Sommaire
Le présent rapport a été commandé par le CCDA dans le cadre de son plan de recherche de trois ans. La recherche a été menée par quatre groupes sélectionnés parmi les autorités responsables de l'apprentissage de plusieurs provinces et territoires et du ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences (RHDCC). Elle se base sur les conseils d’un chercheur indépendant ayant de l’expérience en recherches sur l'apprentissage et les analyses de données d’enquêtes à grande échelle.
La recherche vise à approfondir la compréhension des liens entre la réussite, et les résultats et la reconnaissance professionnelle dans le cadre d’un programme d’apprentissage. L’accent a été principalement mis sur la formation et les résultats sur le marché du travail, et dans une moindre mesure, sur les résultats sociodémographiques.
Par le passé, des recherches ont démontré que la réussite d’une formation d’apprenti et la reconnaissance professionnelle représentent des atouts considérables sur le marché du travail. Cependant, la réussite d’une formation reste un défi, car un nombre considérable d’apprentis suivent leur programme pendant une période supérieure à la durée nominale prévue. Et plusieurs autres abandonnent tout bonnement. Selon des études de Statistique Canada, le taux de réussite après dix ans s’applique à un pourcentage d’environ 50 % pour les cohortes ayant entamé leur programme dans les années 1990. Cependant, aucune étude sur les résultats liés à la réussite n’a été entreprise récemment. De plus, la plupart des études traitant des résultats sur le marché du travail ont dû s’appuyer sur des titres de compétences généraux et des indicateurs auto-déclarés relatifs aux résultats sur le marché du travail.
L’apport unique de cette étude découle d’un accès à des données beaucoup plus complètes sur la formation et le marché du travail. La source principale de données se compose de trois fichiers créés par Statistique Canada spécialement pour cette étude. Ces fichiers relient les données du Système d'information sur les apprentis inscrits (SIAI) à la base de données principale sur les déclarations de revenus (FFT1). Ils contiennent beaucoup plus de renseignements définitifs sur les sources de revenus que toute autre base de données et établissent un lien entre le statut d’apprenti et le revenu. De plus, les chercheurs avaient accès à des tableaux détaillés publiés sous forme de séries chronologiques tirés du SIAI et de l’Enquête sur la population active (EPA), ce qui a permis d’effectuer un suivi des métiers et de la place de la formation dans les métiers/formation d'apprenti dans le contexte du marché du travail global.
En ce qui a trait aux résultats en matière de formation, il a été démontré que l’augmentation rapide des inscriptions à un programme d'apprentissage, observée au cours de la dernière décennie, commence à entraîner une hausse significative du nombre de finissants (en tenant compte du délai entre le moment de l’inscription et la réussite). Toutefois, les taux de réussite peuvent avoir légèrement chuté dans certaines régions, avec un taux de près de 40 % des cohortes de 2000 à 2003 ayant affiché des taux de réussite après dix ans, par rapport au taux de 50 % signalé dans des études antérieures. Et après environ six ans, nombre de ceux n’ayant pas terminé la formation ont tout simplement abandonné. Néanmoins, près de 10 % sont demeurés des apprentis pendant une période de dix ans ou plus.
Les travailleurs qualifiés, soit ceux ayant accumulé suffisamment d’expérience professionnelle pertinente à l’extérieur du système d’apprentissage et s’étant présentés à l’examen menant à la reconnaissance professionnelle, représentent au moins 40 % du nombre annuel des personnes recevant un certificat. Ce chiffre est en baisse, car le nombre de finissants augmente, alors que celui des travailleurs qualifiés commence à fléchir.
Selon le Recensement de 2006, environ 17 % de la population active a déclaré détenir un certificat d'apprenti inscrit et une proportion somme toute égale a indiqué détenir un autre type de certificat remis par une école de métier. De ce premier groupe, près de la moitié occupe actuellement un poste dans le secteur des métiers, comparativement à environ un tiers du deuxième. Les résultats combinés témoignent d’un déséquilibre important entre les titres de compétences acquis et les postes occupés dans les métiers.
Historiquement, les taux de chômage ont tendance à être légèrement plus élevés dans les métiers que dans d’autres professions, plus particulièrement dans le secteur de la construction. Les gens de métiers, ayant moins qu’un baccalauréat, touchent un salaire annuel médian plus élevé que les travailleurs dans d’autres professions. Dans les métiers, les personnes titulaires d’un certificat d’apprenti inscrit et celles ayant terminé un programme d’études collégiales de deux ans ou plus gagnent les salaires les plus élevés. Le taux de salaire médian et la prime d’apprenti varient considérablement d’un métier à l’autre, les revenus et les primes étant plus importants au sein de métiers liés à la mécanique et plus faibles dans ceux liés aux services.
Les résultats ci-dessus s’appliquent à l’ensemble du marché du travail des métiers. Parmi les groupes ayant le statut d’apprenti identifiés par le SIAI et inclus dans les fichiers couplés, les finissants ont affiché le plus haut niveau de revenu d'emploi. Un an après l’obtention du certificat, les finissants gagnent 7 000 $ de plus que les travailleurs qualifiés. Et cinq ans après l’obtention du certificat, les finissants touchent 4 000 $ de plus que les travailleurs qualifiés. Au cours des années précédant l’obtention de leur reconnaissance, ces derniers touchent des salaires plus élevés que les travailleurs d’autres groupes. Toutefois, les travailleurs qualifiés sont généralement plus âgés que les finissants, soit de plus de onze ans, lorsqu’ils reçoivent leur certificat.
Lors des premières années suivant leur inscription, les persévérants et les décrocheurs ont environ la même trajectoire de revenu. Ce sont lors des années qui suivent que les persévérants commencent à gagner plus que les décrocheurs. Les persévérants à long terme ont tendance à toucher plus que ces deux groupes, mais considérablement moins que les finissants et les travailleurs qualifiés. De fortes variations ont été observées dans l’ensemble des métiers.
On dénote peu de travailleurs autonomes dans les groupes ayant le statut définis par le SIAI. Les quelques exceptions observées furent chez les travailleurs qualifiés de certaines professions (soient celles de coiffeurs-stylistes/barbiers, charpentiers, plombiers et électriciens), où le taux d’emploi autonome est d’environ 20 à 30 %. La rémunération nette des travailleurs autonomes est beaucoup plus faible que celle des travailleurs salariés, avec des salaires médians de moins de 5 000 $ pour les finissants et de 7 000 $ pour les travailleurs qualifiés. Bien qu’environ la moitié des travailleurs autonomes aient également indiqué qu’ils touchaient des revenus d’emploi, le montant total combiné demeurait tout de même plus faible que celui des travailleurs salariés.
Pour les groupes du SIAI de 2008, la mobilité interprovinciale était plus faible chez les finissants et plus élevée chez les décrocheurs et les travailleurs qualifiés, en 2009. Les travailleurs qualifiés et les gens titulaires d’un certificat portant la mention Sceau rouge étaient plus mobiles que ceux non titulaires d’un tel certificat en 2009. À noter que le Manitoba, l’Alberta et la Saskatchewan étaient les destinations principales des travailleurs qualifiés titulaires d’un certificat portant la mention Sceau rouge, tandis que ceux n’ayant pas de certificat en 2008 avaient choisi les provinces de l’Atlantique et la Saskatchewan en 2009.
La mobilité à plus long terme a été étudiée en effectuant le suivi de la cohorte de 2004 du SIAI, pour les années de 2002 à 2009. Somme toute, c’est en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick que le taux de mobilité vers l’extérieur était le plus élevé. C’était le groupe des travailleurs qualifiés sans certificat portant la mention Sceau rouge qui se déplaçait le plus. L’Alberta fut la destination la plus populaire pour tous les groupes, hormis les travailleurs qualifiés sans la mention Sceau rouge, suivi de la Colombie-Britannique, quoique le pourcentage ait été moins important que pour l’Alberta.
Moins de renseignements étaient disponibles sur les résultats sociodémographiques. Selon les données de l’ENA, les apprentis avaient une opinion plus ou moins positive de leur programme et relativement peu d’entre eux avaient signalé d'importantes difficultés quant aux formations techniques ou en cours d’emploi. Ceux ayant un plus haut niveau de scolarité et de l’expérience professionnelle affichaient généralement une attitude plus favorable. Certaines données portent à croire que les persévérants à long terme éprouvent plus de difficultés en cours de formation que les autres groupes.
L’étude confirme que les femmes apprenties sont concentrées dans un petit nombre de métiers, plus particulièrement ceux de coiffeuses-stylistes (près de 80 % des apprentis sont des femmes) et de cuisinières (près de 30 %), avec un très faible pourcentage d’entre-elles dans les autres métiers. La croissance du nombre de femmes exerçant un métier figurant dans la liste des dix principaux métiers a été lente, à l’exception des deux professions susmentionnées, et légèrement plus rapide pour ce qui est des autres métiers de cette liste. Néanmoins, même au cours des dernières années, les femmes n’ont représenté qu’à peu près 2 % des travailleurs des autres métiers sur la liste, et environ 11 % des travailleurs dans tous les autres métiers. Il y a également peu de travailleuses qualifiées dans tous les domaines.
Les immigrants sont également sous-représentés dans les métiers, où ils représentent environ 8 % par rapport à 20 % pour la population en général. La proportion d’immigrants apprentis varie considérablement dans les régions, avec l’Ontario ayant un pourcentage plus élevé que la moyenne canadienne, l’Alberta et la Colombie-Britannique ayant un taux proche de cette moyenne, et les provinces de l’Atlantique, le Québec, le Manitoba et la Saskatchewan connaissant un plus faible taux de participation des immigrants.
Une analyse des séries chronologiques révèle que les métiers ont occupé une place stable au sein du marché du travail pendant la dernière décennie, après avoir connu une légère baisse dans les années 1990. La proportion occupée par les métiers dans l'ensemble de la main-d'œuvre dépend de la définition spécifique des métiers. Ce chiffre passe d’environ 11 % pour les principaux métiers d’apprentissage à 17 % pour les métiers définis en vertu du groupe H de la CNP-S (les emplois dans les métiers, le transport, la machinerie et les professions connexes). Environ 35 % de ceux qui travaillent dans les métiers ont un certificat d’une école de métier ou un certificat d'apprentissage. Ce chiffre a quelque peu augmenté au cours des dernières années. Le taux de travailleurs titulaires d’un certificat tend à être plus élevé dans les métiers figurant dans la liste des dix principaux métiers, soit à environ 40 %. On observe toutefois des écarts considérables selon le métier, variant de 68 % chez les coiffeurs-stylistes à 13 % chez les cuisiniers.
Le nombre d'inscriptions aux programmes d’apprentissage a augmenté considérable par rapport au marché du travail des métiers global au cours des dix dernières années. Une tendance semblable est observable quant au nombre de finissants, avec la hausse la plus rapide ayant été enregistrée au cours des dernières années, en tenant compte du délai entre la hausse du nombre d’inscriptions et celle du nombre de finissants. Depuis le milieu des années 1990, le nombre d’inscriptions aux programmes d’apprentissage a aussi augmenté de manière substantielle par rapport au nombre d’inscriptions à des programmes postsecondaires, et ce, encore plus particulièrement au fil des dernières années. Jusqu’en 2002, le nombre de personnes réussissant une formation d’apprenti a légèrement été inférieur à celui réussissant leurs études postsecondaires. Ce chiffre a augmenté dernièrement. Les programmes d’apprentissage semblent donc attirer de plus en plus de jeunes.
Les projections liées à la demande du marché du travail, faites à partir du Système de projection des professions au Canada, indiquent, de manière générale, de la stabilité ou un léger déclin pour certains métiers désignés. La croissance prévue du nombre d’inscriptions aux programmes d’apprentissage et de finissants au cours des prochaines années démontre que l’apprentissage jouera vraisemblablement un rôle croissant pour ce qui est de répondre à la demande.
Néanmoins, les résultats doivent être interprétés avec prudence en raison des nombreuses incertitudes découlant de ces projections. D’autres facteurs inconnus doivent être considérés, comme le nombre d’apprentis et de finissants qui occupent réellement un emploi dans leur domaine de formation. Il est également important de savoir si les apprentis et les finissants doivent être considérés comme de nouveaux venus sur le marché du travail ou si l’on doit considérer qu’ils participent déjà à la population active.
Remerciements
Ce rapport fut préparé par quatre équipes de recherche. Chacune fut responsable de l’un des éléments essentiels. Les auteurs des principaux chapitres sont les suivants :
Chapitre 3 |
Christopher Pepin (chef d’équipe) Kristal Hurrell |
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Chapitre 4 |
Robert Crocker |
Chapitre 5 |
Steven Wald (chef d’équipe) Julia Wiebe Gina Wong |
Chapitre 6 |
Nina Ahmed |
Monsieur Robert Crocker a agi à titre de conseiller pour les équipes de recherche. Il fut également le rédacteur en chef du rapport final et le principal auteur des deux premiers chapitres ainsi que d’un rapport sommaire distinct.
Les auteurs tiennent à remercier messieurs Benoit Cadieaux et Trent Craddock de RHDCC, les co-présidentes du Comité de recherche du CCDA, mesdames Micheline Racette et Cordella Frisen ainsi que les autres membres de ce comité pour leurs conseils et recommandations tout au long de ce projet et pour leurs commentaires sur les différentes ébauches. Les auteurs désirent également remercier mesdames Anna Rigakis et Louise Desjardins de Statistique Canada pour leur travail sur les fichiers couplés et pour leurs réponses rapides et précises à de nombreuses demandes de produits statistiques tirés de ces fichiers.
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